John PERCIVAL Critique de danse

Rudolf Noureev souvenirs John Percival

Lorsque je me replonge dans mes souvenirs de sa longue carrière à l’Occident, il me semble que l’un des secrets du succès de Noureev tient à ce que dans tout ce qu’il entreprenait, il faisait plus que ce qui était nécessaire. Comme danseur il commença tôt et consciencieusement, me dit-il, à élargir les possibilités offertes aux danseurs hommes afin de montrer que sans perdre de sa virilité un premier danseur pouvait être tout aussi délicatement subtil et expressif qu’une ballerine. Etant un classique par excellence (personne me semble-t-il ne peut égaler la perfection de son dernier solo dans la Belle au Bois Dormant) il a dû aussi maîtriser les styles contemporains de Martha Graham, Paul Taylor, José Limon et Murray Louis.

C’est toujours la difficulté qui l’attirait. Lorsqu’il monta la scène du Royaume des Ténèbres dans la Bayadère, l’une des personnes du Royal Ballet lui suggéra de changer un pas pour rendre son solo plus facile sans qu’il en soit moins spectaculaire pour autant. La réponse de Rudolf fut : « Comment pourrais-je danser si je ne m’imposais pas des choses que je ne peux pas faire ? « . (…) Lorsqu’il devin directeur du Ballet de l’Opéra Garnier, sa passion inépuisable pour les nouvelles expériences en matière de danse, de dramaturgie, de musique ou d’art s’est associée à sa maîtrise de la danse et à sa connaissance de la chorégraphie pour lui apporter la compréhension et une autorité, un flair et une perspicacité comparable à ceux de la grande fondatrice du Royal Ballet, Dame Ninette de Valois.

Rien d’étonnant à ce que certains d’entre nous en Grande Bretagne se soient rendus à Paris pratiquement chaque moi pour suivre la grande richesse chorégraphique qu’il proposait. (…) Bien que Rudolf ne soit plus parmi nous, son esprit se perpétue dans le corps des danseurs d’aujourd’hui.

A chaque fois que je vibre en voyant danser Charles Jude, Laurent Hilaire ou Nicolas Le Riche, je sais qu’ils auraient été de toute façon de bons danseurs mais c’est grâce à l’homme auquel nous rendons hommage aujourd’hui qu’ils ont atteint la grandeur.